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24 janvier 2014 5 24 /01 /janvier /2014 22:58

 

Autres sources chrétiennes

Papyrus Egerton 2
un évangile apocryphe à l’auteur inconnu, entre 100 et 150, British Museum, Londres

Les agrapha, mot signifiant « choses non écrites », sont des paroles de Jésus qui ne se trouvent pas dans les textes canoniques. Certaines d’entre elles pourraient être authentiques. Elles proviennent de variantes des Évangiles, des papyri d’Oxyrhynque, des textes apocryphes du Nouveau Testament comme l’Évangile selon Thomas, dont les fouilles de Nag Hammadi ont mis au jour une traduction complète en copte et dont l’attribution à l’apôtre Thomas est rejetée par les chercheurs. Le Papyrus Egerton 2 publié pour la première fois en 1935, composé de 4 fragments, retranscrit des faits et des paroles à rapprocher de l’Évangile selon Jean.

Les apocryphes (du grec απόκρυφος / apókryphos, « caché ») sont très divers dans leur style et leur contenu : récits de l’enfance (Protévangile de Jacques), recueil de logia (Évangile selon Thomas), descente aux Enfers (Actes de Pilate), harangues, récits de miracles, etc. La critique textuelle laisse cependant apparaître une fiabilité documentaire nettement supérieure des textes du Nouveau Testament182

Les écrits des Pères apostoliques183 (Didachè, Épître de Clément de Rome, les Lettres d’Ignace d’Antioche184, Lettres de Polycarpe de Smyrne, Lettre de Barnabé, Lettre à Diognète, Fragments de Papias d’Hiérapolis, Le Pasteur d’Hermas) dont les auteurs, bien que vivant à la fin du Ier siècle, n’ont pas de liens directs avec la génération apostolique. Il arrive à d’autres Pères de l’Église comme Eusèbe de Césarée ou Jérôme de Stridon de citer des fragments d’évangiles apocryphes, en général pour en contester la valeur (Évangiles des Hébreux, des Ébionnites, des Égyptiens, des Nazôréens, …)



Sources non chrétiennes

Chez les auteurs juifs

Flavius Josèphe

Article détaillé : Testimonium flavianum.

Il n’existe aucun acte officiel des autorités romaines se rapportant à Jésus. Le premier chroniqueur qui évoque Jésus vers 94 est Flavius Josèphe, romain d’origine juive né en 39. Son témoignage mentionne, dans ses Antiquités judaïques, Jésus à deux reprises. Il est évoqué au sujet de la lapidation de Jacques de Jérusalem, décrit comme « le frère de Jésus appelé Christ »v 23. Un passage beaucoup plus développé consacré à Jésus lui-même, connu sous son nom latin de Testimonium flavianum, le décrit comme « un homme exceptionnel, [qui] accomplissait des choses prodigieuses […] et se gagna beaucoup de monde parmi les juifs… », puis mentionne la résurrection, l’admiration et la foi de ses disciples évoquant une lignée de « chrétiens » qui se perpétue à l’époque de Josèphev 24. L’authenticité de ce passage fait encore l’objet de débat, la plupart des commentateurs envisagent aujourd’hui que ce passage, en son état actuel, a été retouché par des mains chrétiennes, ce qui n’exclut pas que Josèphe ait rédigé une notice sur Jésus, peut-être moins enthousiaste185.

Le patriarche de Constantinople Photios, grand érudit du IXe siècle, signale avec étonnementn 28 qu’il ne figure aucune mention de Jésus dans l’Histoire des juifs186, texte du Ie siècle aujourd’hui disparu de Juste de Tibériade, un historien juif rival de Flavius Josèphe qui le critique sévèrement dans son Autobiographie.



Le Talmud

Une vingtaine d’allusions possibles à Jésus existent dans le Talmud mais toujours de manière anecdotique et parfois sous un autre nom et ne sont pas antérieures au IIIe siècle187. Il y est fait référence à un certain Yeshu qui aurait conduit le peuple sur de mauvaises voies et fut condamné à mort pour sorcellerie puis pendu la veille de Pâques à Lod. Sa secte aurait survécu à sa mort plusieurs décennies voire plusieurs siècles selon le Talmud.

Depuis le Moyen Âge, on rencontre un Yeshu ou Yeshu Hanotsri (« le Nazaréen ») dans les Toledot Yeshu, écrites entre le IVe et le VIe siècle188 et qui reflètent la version juive des évènements décrits dans les Évangiles. Les historiens pensent généralement qu’il s’agit d’une parodie d’un Évangile perdu, bien qu’il semble au moins partiellement venir de sources juives antiques concernant Yeshu.

Dans le Talmud on rencontre un Yeshu et le personnage a été souvent identifié comme identique à Jésus. Cependant, dans le Talmud, Yeshu se rapporte apparemment à plusieurs personnes vivant à des époques différentes (notamment un siècle avant et un siècle après Jésus) et des indices peuvent laisser penser que le Yeshu du Talmud et le Jésus des Évangiles n’ont pas de rapport entre eux189. En revanche, Joseph Klausner trouve fiable le rapprochement du Yeshu du Talmud avec le personnage de Jésus190.

Le texte le plus intéressant se trouve dans le Talmud de Babylone191 et rapporte une tradition de la « pendaison » de Yeshu (ou Yeshu Hanotsri dans les éditions plus tardives) la veille de la Pâque dans un cadre strictement juif192 ainsi qu’il lui attribue cinq disciples : Mattai, Naqi, Netser, Boni et Todah.

Il est à noter que selon les Toledot Yeshu ainsi que selon le principal narratif concernant Yeshu dans le Talmud, ce dernier vivait un siècle avant l’ère chrétienne. Pour de nombreux commentateurs juifs traditionnels comme Rabbenou Tam, Nahmanide, ou plus récemment Adin Steinsaltz, c’est ce Yeshu qui fut le personnage historique sur lequel fut ensuite construite la figure de Jésus.

Il est souvent fait allusion à Ben Stada, comme étant issu de l’union adultère de Myriam et d’un soldat romain appelé Pandera (à rapprocher de Celse). Le texte de Tossafot sur Shabbat 104, datant du Moyen Âge, écarte cette légende : « Ce Ben Stada n’était pas Jésus de Nazareth, car nous disons ici que Ben Stada vivait à l’époque de Paphos ben Yehudah, lui-même vivant du temps de Rabbi Akiva » soit un siècle plus tard193.

 

Textes païens grecs et latins

Dans une lettre à l’empereur Trajan en 111 ou 112194, Pline le Jeune explique les résultats d’une enquête qu’il a menée sur des chrétiens de Bithynie à la suite d’accusations parvenues jusqu’à lui, et explique qu’il ne trouve pas grand-chose à leur reprocher195. Pline ne parle cependant pas de Jésus de Nazareth et ne mentionne le « Christ » que pour expliquer que ses adeptes de Bithynie se réunissent pour lui chanter des hymnes « comme à un dieu »196.

Vers 116, dans ses Annales197, l’historien romain Tacite relate comment l’empereur Néron, accusé d’avoir causé l’incendie qui ravage Rome en 64, s’ingénie à trouver des incendiaires, accuse ceux que « la foule » romaine appelle chrétiens (christiani), sectateurs de « Christ, qui, sous Tibère, fut livré au supplice par le procurateur Ponce Pilate198», et en fait supplicier bon nombre195.

Les Vies des douze Césars de Suétone, écrites vers 120, comptent quelques mentions des activités des chrétiens199 et mentionnent, dans la Vie de Claude200 un Chrestos — dont il est généralement admis qu’il désigne Jésus-Christ201 — qui, selon Suétone, incomplètement informé, aurait été présent à Rome lors des troubles de 49-50 au sein de la communauté juive de Rome, à l’encontre de laquelle Claude promulgue un édit d’expulsion195.

Une lettre d’un stoïcien nommé Mara bar Sérapion, adressée en syriaque à son fils202, parle d’un « sage roi » exécuté par les siens – les Juifs – à l’instar de Socrate et Pythagore, dans dans ce qui est accepté comme une allusion à Jésus de Nazareth203. Si la recherche s’accorde pour le dater d’après 73, la datation du document est fort débattue, pouvant aller jusqu’à l’aube du Ve siècle, avec une majorité de chercheurs inclinant pour une rédaction au cours du IIe siècle204. Le document renseigne, en tout état de cause, davantage sur le christianisme que sur Jésus tandis que son implication des Juifs est, au mieux, douteuse203 et elle s’inscrit dans une démonstration plus générale205.

L’écrivain satirique Lucien de Samosate, dans la deuxième partie du IIe siècle, fait une allusion au supplice de Jésus, sans le nommer, dans La Mort de Pérégrinos

Jésus dans les religions et cultures non chrétiennes

Jésus dans le judaïsme

Article détaillé : Point de vue du judaïsme sur Jésus de Nazareth.

À la suite des guerres judéo-romaines et des autres catastrophes des Ier et IIe siècles, le judaïsme voit la disparition de presque tous ses courants, à l’exception du judaïsme rabbinique, proche du pharisianisme sans en reprendre l’apocalyptique, fondé sur le respect exclusif à la Loi. Le processus prendra plusieurs décennies, qui fixera les Écritures hébraïques — qui seront reprises des siècles plus tard par les protestants — et les prières synagogales dont une qui contient la condamnation des sectaires, les « minims », dont les « nazôréens »207.

Si le christianisme des premiers temps a pu passer pour un nouveau courant acceptable du judaïsme, il s’est rapidement posé le problème de l’adhésion de plein droit de membres païens sans en faire d’abord des Juifs208. La question se pose au moment de la création de la Torah rituelle, celle des 613 commandements209,210, et, en ce qui concerne les membres non juifs, le problème prend plus de poids quant aux aspects de règle de pureté rituellen 29 et les moyens de « réconciliation »n 30. La messianité, bien qu’elle ait joué un certain rôle lors de la condamnation de Jésus, n’est pas alors déterminante de l’autodétermination juive de cette époque puisque certains courants du judaïsme, tels les sadducéens, allaient jusqu’à renoncer à cette attente211.

Le judaïsme, la religion de Jésus lui-même, n’a pas désormais de point de vue spécifique ou particulier sur le Jésus et très peu de textes dans le judaïsme se réfèrent directement ou parlent de Jésus. En effet, un des principes les plus importants de la foi juive, est la croyance en un Dieu et seulement un Dieu, sans aucun intermédiairev 25. La Trinité chrétienne y est comprise comme une croyance en Jésus en tant que Divinité, partie de Divinité ou fils de Dieu, qui est de ce fait incompatible avec le judaïsme et en rupture avec l’hébraïsme qui le précédait212.« Pour un Juif, toutefois, n’importe quelle forme de shituf (croyance en d’autres dieux en plus du Dieu d’Israël) équivaut à une idolâtrie dans le plein sens du terme. Il n’est pas possible pour un Juif d’accepter Jésus comme une divinité, un médiateur ou un sauveur (messie), ou même comme un prophète, sans trahir le judaïsme. »213. « Les Juifs ont rejeté les revendications que Jésus répond aux prophéties messianiques de la Bible hébraïque, ainsi que les revendications dogmatiques le concernant émises par les pères de l’Église, c’est-à-dire qu’il est né d’une vierge, qu’il est le fils de Dieu, qu’il fait partie d’une Trinité divine et qu’il a ressuscité après sa mort. Pendant deux mille ans, un vœu central du christianisme a été d’être un objet de désir de la part des Juifs, dont la conversion aurait montré leur acceptation du fait que Jésus remplit leur propre prophétie biblique. »214

Pour cette raison, les questions apparentées, telles que l’existence historique de Jésus et les autres sujets concernant sa vie sont de même considérés comme hors de propos dans le judaïsme.

L’eschatologie juive considère que la venue du Messie sera associée avec une série d’évènements spécifiques qui ne se sont pas encore produits, y compris le retour des Juifs en Terre d’Israël, la reconstruction du Temple, une ère de paixv 26.

Jésus dans l’islam

Miniature persane représentant Jésus lors du Sermon sur la montagne

Article détaillé : Îsâ.

Le Coran parle de Jésus sous le nom d’`Îsâ215, personnage indissociable dans les textes coraniques de sa mère Maryam (« Marie »)216. Il est ainsi souvent désigné sous le nom de al-Masïhn 31 `Îsâ ibn Maryamn 32 présenté avec celle-ci comme modèles à suivre216.

Jésus fait partie des prophètes dits « famille de ‘Îmran » avec sa mère, son cousin Yahyâ (Jean le Baptiste) et le père de celui-ci Zacharie217. La foi populaire musulmane accorde une grande importance à Jésus et Marien 33 tandis que Jésus, tourné vers la beauté du monde, apparait par ailleurs souvent avec son cousin Jean, ascète radical, avec lequel il forme une façon de « gémellité spirituelle permanente »218.

L’insistance marquée sur la filiation à Marie est un clair rejet de la filiation divine de Jésus ; néanmoins, la tradition musulmane souligne le caractère miraculeux de sa naissance virginale sans père connu, Joseph – absent du texte coranique – étant considéré par la tradition comme un cousin de Marie. Dans le Coran, Jésus est en effet créé par le kunn 34 etv 27, l’« impératif divin », et conçu par un rûh de Dieu, souffle divin intemporel insufflé en Marie, le même souffle qui anime Adam et transmet la révélation à Mahomet219 etv 28.

Le Coran partage avec les apocryphes chrétiens de nombreuses scènes de vie de Marie et d’enfance de Jésus : offrande de Mariev 29, vie de Marie au Templev 30, prise en charge de Mariev 31, nativité sous un palmierv 32, Jésus parle au berceauv 33, il anime des oiseaux en argilev 34.

Dans le Coran, Jésus apparait comme un prophète, annonciateur de Mahomet, qui prêche le monothéisme pur, accomplit des miracles, opère des guérisons, ressuscite les morts et connait les secrets du cœur. Jésus confirme la Torah, dont il atténue les prescriptions légales220, tandis que son « Écriture », contenue dans l’Injil, est présentée comme « une guidance et une lumière »221 que les chrétiens auraient négligée. Ibn Arabi lui confère le titre de « sceau de la sainteté », « le plus grand témoin par le cœur », tandis que Mahomet est le « sceau des prophètes », « le plus grand témoin par la langue »219. Sa prédication auprès des juifs aurait été un échec222 et il est suivi des seuls apôtres. Les juifs auraient alors voulu le punir en le crucifiant mais Dieu ne l’a pas permis et lui aurait alors substitué un sosie223 avant de le rappeler à luiv 35. Néanmoins la fin terrestre de Jésus reste obscure, aucun passage ne signifiant clairement ce qu’il en est advenu.

La représentation de Jésus dans le Coran lui confère également une dimension eschatologique224 : son retour sur terre, en tant que musulman, est le signe de la fin du monde et du Jugement dernier tandis que beaucoup de hadiths le présentent comme le principal compagnon du Mahdi, Sauveur de la fin des temps225.

En définitive, on trouve dans le Coran quatre négations catégoriques concernant Jésus, par crainte d’associationnisme (shirk)219 : il n’est ni Dieu, ni son fils, ni le troisième d’une triaden 35 pas plus qu’il n’a été crucifiév 36 car cela aurait été « indigne » d’un prophète de son « importance »219.

Enfin, depuis le début du XXe siècle, une minorité musulmane syncrétiste résidant dans les montagnes du Pakistan, les Ahmadis, voue à Jésus un culte tout comme aux saints de l’islam autour d’un tombeau qu’elle dit être celui de Yuz Asaf identifié à Jésus. Le lieu de culte est situé à Srinagar. Ce courant développe une christologie particulière selon laquelle Jésus est un prophète de Dieu qui aurait été déposé de la croix en état de coma et non mort et, une fois soigné, serait venu finir sa vie au Pakistan jusqu’à 120 ans226. Cette doctrine est celle de l’« évanouissement ».

Représentation artistique

Articles détaillés : Représentation artistique de Jésus Christ et Art chrétien.

Sculpture en marbre paléochrétienne du Bon Pasteur, vers 300. Musée du Vatican

Les auteurs des évangiles, issus d’un contexte judaïque généralement réticent à l’égard des images par peur d’idolâtrie, semblent considérer que les paroles de Jésus sont plus importantes que son apparence et ne donnent aucune description de celui-ci227.

L’art chrétien ne va pas de soi et trouve ses origines dans l’art païen et polythéiste, en l’imaginaire duquel les peintres et sculpteurs antiques puisaient. Les pères de l’Église, pour leur part, contestaient l’art en tant que tel en des termes assez durs et se réclamaient de l’Ancien Testament qui condamne radicalement l’iconographiev 37. Clément d’Alexandrie liste néanmoins, vers 200, des éléments qui peuvent endosser une signification chrétienne sur les sceaux ou les bagues, tel le poisson, un symbole chrétien dont le terme grec (ἰχθύς / Ichthus) constituait un acronyme des noms de Jésusn 36.

Si au début du IVe siècle le concile d’Elvire interdit encore les images peintes sur les parois des églises, l’art chrétien a cependant déjà pris son essor, dans une visée qui n’est pas étrangère à l’apologétique228.

L’évolution du rapport à la représentation du Christ se transforme dès le premier tiers du IIe siècle et une iconographie christique apparaît progressivement dans les catacombes et sur les sarcophages. Les représentations en demeurent cependant rares au profit de figures de l’Ancien Testament, comme Moïse ou Jonas, et Jésus n’est représenté que dans un petit nombre de scènes : son baptême, des miracles ou guérisons, l’entrevue avec la Samaritaine, … Son action de thaumaturge est souvent soulignée dans cette première vague iconographique qui le présente également parfois au milieu de ses disciples à l’instar des philosophes grecs227.

Buste de Jésus. Peinture murale dans les catacombes de Commodilla, fin du IVe siècle

Ce Jésus des premières représentations est souvent beau, juvénile, voire séduisant — même si son visage est souvent « passe-partout », ne se différenciant guère de l’iconographie habituelle du panthéon gréco-romain — à contre courant des descriptions des Pères de l’Église qui le présentent comme quelconque, voire laid ou pitoyable227. Il est souvent représenté sous forme du « Bon Pasteur » dans une image qui procède d’un Hermès « criophore »229, à mettre en parallèle avec Orphée, un autre « bon pasteur », image qui va se multiplier sur les premiers sarcophages chrétiens et sur les voûtes des hypogées. Hermas décrit par exemple Jésus au IIe siècle comme « un homme à l’air majestueux, en costume de pâtre, couvert d’une peau de chèvre blanche, une besace sur l’épaule et une houlette à la main »230.

Le christianisme devenant progressivement la religion officielle de l’Empire à partir du IVe siècle, l’iconographie va petit à petit se libérer du modèle gréco-romain, notamment influencée par les débats christologiques qui caractérisent cette période. C’est dans le dernier tiers du siècle que commence à apparaître la dimension divine — la « puissance cosmique » — du Christ dans les représentations jusqu’alors plutôt marquées par l’aspect protecteur et guérisseur du personnage227.

Christ Pantocrator, VIe siècle, église Ste-Catherine du Sinaïe, Égypte.

À cette époque, Jésus est encore généralement représenté comme un éphèbe glabre ou encore sous la forme d’un petit garçon qui correspond à une dénomination habituelle du Christ à l’époque (« pais », du grec παις, l’« enfant ») ; ce n’est qu’à partir de la fin du IVe siècle qu’il est représenté plus âgé et barbu, sous l’inspiration du modèle du philosophe enseignant de l’Antiquité. Ces deux types distincts de représentations coexisteront pendant près de deux siècles encore227.

À partir du Ve siècle, c’est le caractère divin qui constituera la dimension principale des représentations, appuyant l’insistance du Credo de Nicée sur l’égalité du Père et du Fils et traduisant la structuration par la hiérarchisation et le dogme, dans une image de la « gloire de Dieu » qui dominera l’art chrétien jusqu’à l’art gothique227. L’aspect humain perdurera cependant à travers les icônes, bien que la plupart aient été détruites lors de la crise iconoclasten 37, qui trouveront un prolongement dans l’art byzantin qui fera la synthèse entre les aspects humain — idéalisé en philosophe enseignant — et divin, légitimé depuis le concile de Nicée II en 787.

Les traditionnelles représentations de la Vierge à l’Enfant puisent quant à elles leurs origines dans les représentations de la déesse d’origine égyptienne Isis allaitant Horus231.

Art occidental

L’Église catholique autorisant les représentations du Christ, celui-ci a été l’objet d’un nombre incalculable de figurations sous forme de portraits, de tableaux mettant en scène sa vie, de sculptures, de gravures, de vitraux, etc. Dans l’art occidental, le personnage de Jésus est certainement celui qui a fait l’objet du plus grand nombre de représentations. Une des figurations les plus courantes est celle du Christ en croix, au moment de sa Passion. Toutes ces représentations relèvent de la création artistique, aucune image contemporaine au Christ ne nous étant parvenue. Quelques images achéiropoiètes (« non faites de main d’homme ») — dans une christianisation de la tradition païenne des « images tombées du ciel » — prétendent représenter le « véritable » visage de Jésus. Malgré la diversité des artistes et des époques, elles ont toutes quelques traits communs. En fait, les représentations de Jésus obéissaient à des canons artistiques précis232, basés sur la tradition et les plus anciennes représentations connues : Jésus est présenté comme un homme de race blanche, de taille moyenne, plutôt mince, au teint mat et aux cheveux bruns, longs ; il sera plus tardivement représenté avec une barbe233.

Sa tête est souvent entourée d’un cercle lumineux ou doré, appelé auréole, attribut courant figurant la sainteté d’un personnage. Quand elle s’applique à Jésus, cette auréole est souvent marquée conventionnellement d’une croix (généralement rouge), qui permet de l’identifier sans ambiguïté.

L’expression des yeux est l’objet d’une attention particulière des artistes. De même, la position de ses mains a souvent une signification religieuse. L’Église catholique ayant exprimé le souhait que la vie de Jésus puisse être comprise par tous, il n’est pas rare de trouver en Afrique des figurations du Christ en homme de race noire, ou en Amérique du Sud des représentations de sa vie avec des vêtements locaux. Ce phénomène est ancien, puisque les artistes de la Renaissance représentaient déjà Jésus entouré de personnages habillés selon la mode de leur siècle (voir le groupe de personnes à droite sur le tableau de Fra Angelico, Descente de Croix).

Fra Angelico, Descente de Croix, vers 1440,
Museo di San Marco, Florence

Au Moyen Âge, les représentations visuelles avaient une fonction éducative : en mettant en scène la vie de Jésus-Christ, on diffusait la culture chrétienne à des personnes ne sachant généralement pas lire, et n’ayant de toute façon pas accès aux livres, y compris aux livres saints tels que la Bible. C’est ce qui est à l’origine de la crèche de Noël, tradition encore très active dans les milieux chrétiens. Certaines scènes sculptées sur les calvaires bretons, comme celui de la chapelle de Tronoën par exemple, sont de véritables résumés de la vie de Jésus. De même, toute église catholique est pourvue d’un chemin de croix (en latin Via Crucis) qui figure en 14 étapes, appelées « stations », les différents moments de la Passion du Christ, depuis sa condamnation jusqu’à sa mise au tombeau. Généralement réparties sur les pourtours de la nef, ces étapes sont représentées le plus souvent par des tableaux ou des petites sculptures ; pour les plus simples il s’agit seulement d’une croix accompagnée du numéro de la station. Jusqu’à récemment dans toutes les maisons catholiques, les pièces principales et les chambres étaient pourvues d’un Christ en croix, généralement accroché sur le mur au-dessus du lit ou de l’accès à la pièce.

Art oriental

Les orthodoxes acceptent la représentation du Christ en deux dimensions. La représentation la plus courante est celle des icônes.

Au VIIIe siècle, sous la poussée des Arabes à l’Est et des Bulgares à l’Ouest, des mesures seront prises dans l’Empire romain d’Orient contre les images et les statues qui peuplent les églises dans le but d’unifier l’empire derrière le seul chrisme, déclenchant la crise iconoclaste qui durera plus d’un siècle234. Après la fin des guerres iconoclastes, le christianisme oriental donne lieu au développement d’un art spécifique, l’icône, basée sur une grammaire picturale très organisée. Ces images sont sacrées, l’esprit du ou des personnages représentés est censé « habiter » la représentation. L’iconographe — le peintre d’icône — se prépare à la fois par un apprentissage théologique et par une ascèse, le plus souvent le jeûne et la prière.

Les icônes sont anonymes jusqu’au XVe siècle.

Articles détaillés : Andrei Roublev et Théophane le Grec.

Reliques

Staurothèque byzantine du début du IXe siècle contenant des fragments de la « Vraie Croix »,
Metropolitan Museum of Art, New-York

Articles détaillés : Relique et Invention de reliques.

Jésus de Nazareth qui, pour les chrétiens, est ressuscité avec son enveloppe charnelle, a pu néanmoins laisser des traces de sa vie matérielle qui peuvent être considérées comme des reliques par certains croyants, ce suivant des traditions plus anciennes : dès l’époque paléochrétienne, on montrait aux pèlerins qui faisaient le voyage de la Terre Sainte différentes reliques vétérotestamentaires comme la verge d’Aaron qui, d’après l’Épître aux Hébreux, était conservée dans l’arche de l’Alliance dans le saint des saints du Temple de Jérusalem235.

Le culte des reliques relatives à la vie et la Passion de Jésus a débuté vers 325, avec l’excavation du tombeau enfoui de Jésus sur l’ordre de l’empereur Constantin. La découverte de la « vraie Croix », que la tradition attribuera par la suite à l’impératrice Hélène, mère de Constantin, est probablement contemporaine de ces fouilles236 et un complexe d’édifices cultuels de dévotions est bientôt construit pour accueillir les pèlerins. Cette découverte semble avoir eu un grand retentissement et, dès les Ve et VIe siècles, les pèlerins les plus illustres affluent pour obtenir des fragments de l’objet236 que l’on retrouve dès cette époque en Occident. En 680, le pèlerin Arculfe atteste qu’il a vu à Jérusalem, dans l’Anastasis — première église de la Résurrection — exposée une série de reliques : le plat de la Cène, l’éponge et la lance qui a percé le flanc de Jésus lors de la Crucifixion, ainsi qu’un suaire ayant couvert le visage de Jésus au tombeau237.

Le développement du culte des reliques qui s’ensuit à la période carolingienne238 — pour atteindre, à la suite des Croisades, son apogée au Moyen Âge — relève d’une « spiritualité du voir et du toucher »239 qui essaie d’entrer en contact avec la sainteté dont sont porteurs les « témoins » matériels de la vie de Jésus, témoins matériels qui tendent dès lors à se multiplier et se disséminer — après avoir été centralisés dans un premier temps à Constantinople — un peu partout à travers l’Europe. Devenues signe — voire enjeu — de pouvoir et de légitimité240, elles vont rapidement faire l’objet, comme le montre Peter Brown, d’un intense commerce241; d’autres auteurs ont également montré l’essor de ce commerce selon un trajet Orient vers Occident à partir des Croisades242.

Si les reliques se rapportant à Jésus sont littéralement innombrables, on peut cependant les classer en plusieurs catégories : au-delà des « ipsissima loca » — « lieux-même » qui ont pu voir évoluer Jésus — on peut relever les instruments de la Passion (notamment la couronne d’épines, l’éponge, la lance qui lui a percé le flanc, etc.), les reliques corporelles liées à la vie publique de Jésus (calice utilisé lors de la Cène) ou même à son enfance (sang, sandales, dents de lait…), et les linges funéraires et suaires. Il faut noter que beaucoup des reliques sont rejetées par les autorités religieuses243 et que les excès de leurs cultes ont par ailleurs souvent fait l’objet de débats et de contestations.

Annexes

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Bibliographie

Article détaillé : Bibliographie de la christologie.

Ouvrages et travaux historiens généralistes

  • Geza Vermes, Dictionnaire des contemporains de Jésus, Bayard, 2008 ;

  • Les premiers temps de l’Église, présenté par Marie-Françoise Baslez, éd. Gallimard/Le monde de la Bible, 2004 ;

  • Pierre Gibert et Christophe Theobald (dir.), Le cas Jésus Christ. Exégètes, historiens et théologiens en confrontation, éd. Bayard, 2002 ;

  • Dictionnaire encyclopédique de la Bible, éd. Brépols, 1960, Mise à jour 2002

  • Aux origines du christianisme, présenté par Pierre Geoltrain, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000 ;

  • La Bible, Écrits intertestamentaires, Écrits apocryphes chrétiens, coll. « La Pléiade », éd. Gallimard, 1987 ;

Historiens et exégètes biblistes

  • José Antonio Pagola, Jésus : Approche historique, Cerf,‎ 2013 ;

  • Daniel Marguerat, Elian Cuvilier, Sylvie Barnay, Simon Mimouni et alii, Jésus, compléments d’enquête, éd. Bayard-Centurion/Le Monde de la Bible, 2007 ;

  • James D. Tabor, La véritable histoire de Jésus : Une enquête scientifique et historique sur l’homme et sa lignée, traduit de l’anglais par Bernard Cohenéd. Robert Laffont, 2007

  • Gerd Theissen, Le mouvement de Jésus. Histoire sociale d’une révolution des valeurs, traduit de l’allemand par Joseph Hoffmann, éd. Cerf, 2006 ;

  • Raymond E. Brown p.s.s., La mort du Messie, Encyclopédie de la Passion du Christ. De Gethsémani au tombeau. Un commentaire des récits de la Passion dans les quatre Évangiles, préface par Daniel Marguerat, traduit de l’anglais par Jacques Mignon, éd. Bayard, 2005, recension ;

  • David Flusser et R. Steven Notley, Jésus, traduit de l’anglais par G.-R. Veyret, éd. L’Éclat, 2005 ; extraits en ligne

  • John Paul Meier, Un certain juif : Jésus. Les données de l’histoire

    • tome I : Les sources, les origines, les dates, éd. Cerf, 2004 ;

    • tome II : La parole et les gestes, éd Cerf, 2005 ;

    • tome III : Attachements, affrontements, ruptures, éd Cerf, 2005 ;

    • tome IV : La Loi et l’amour, éd. Cerf, 2009 ;

  • François Bovon, Les derniers jours de Jésus, éd. Labor et Fides, 2004

  • Michel Quesnel, Jésus, l’homme et le fils de Dieu, éd. Flammarion, 2004 ;

  • Étienne Nodet, Histoire de Jésus ? Nécessité et limites d’une enquête, éd. du Cerf, 2003, présentation en ligne ;

  • Daniel Marguerat, E. Norelli, J.-M. Poffet, Jésus de Nazareth, nouvelles approches d’une énigme, Labor et Fides/le Monde de la Bible, 2003 ;

  • Peter J. Thomson, Jésus et les auteurs du Nouveau Testament dans leur relation au judaïsme, traduit de l’anglais par Joseph Duponcheele, éd. Cerf, 2003 ;

  • Geza Vermes, Enquête sur l’identité de Jésus. Nouvelles interprétations, Bayard, 2003 ;

  • Lucette Valensi, La fuite en Égypte. Histoires d’Orient et d’Occident. Essai d’histoire comparée, éd. Seuil, 2002, recension en ligne ;

  • Étienne Nodet, o.p., Le fils de Dieu, Procès de Jésus et Évangiles, éd. du Cerf, 2002, présentation en ligne ;

  • Alain Marchadour (dir.), Que sait-on de Jésus de Nazareth ?, Bayard, 2001

  • Laurent Guyénot, Jésus et Jean-Baptiste. Enquête historique sur une rencontre légendaire, éd. Exergue, 1999 ;

  • Jacques Schlosser, Jésus de Nazareth, éd. Noesis, 1999 ;

  • Hugues Cousin et Jean-Pierre Lémonon, Le monde où vivait Jésus, éd. Cerf, 1998 ;

  • Gerd Theissen, L’ombre du Galiléen, éd. Cerf, 1998

  • Charles Perrot, Jésus, éd. P.u.f, coll. « Que Sais-je ? » no 3300, 1998 ;

  • Charles Perrot, Jésus, Christ et Seigneur des premiers chrétiens, éd. Desclée de Brouwer, Paris, 1997 ;

  • Gerd Theissen, Histoire sociale du christianisme primitif. Jésus, Paul, Jean, traduit de l’allemand par Ira Jaillet et A.-L. Finck, éd. labor et Fides/Le Monde de la Bible, 1996, extraits en ligne

  • Xavier Tilliette, Le Christ des philosophes. Du Maître de sagesse au divin Témoin, Culture et Vérité, Namur, 1993

  • Xavier Tilliette, Jésus romantique, Desclée-Mame, 2002

  • Pierre-Antoine Bernheim, Jacques, frère de Jésus, éd. Noésis, 1996 ;

  • Raymond E. Brown, Jésus dans les quatre Évangiles, Cerf, 1996 ;

  • (en) John Dominic Crossan, The historical Jesus, The life of a Mediterranean Jewish Peasant, éd. Harper Collins, 1991 ;

  • Charles Perrot, Jésus et l’histoire, éd. Desclée de Brouwer, 1979 ;

  • Geza Vermes, Jésus le Juif, Desclée, 1978

Théologiens et exégètes canonistes

  • Joseph Ratzinger, (Benoît XVI), Jésus de Nazareth, éd. Flammarion, 2007

    • tome 1 : Du baptême dans le Jourdain à la Transfiguration

  • Charles-Harold Dodd, Le Fondateur du christianisme, éd. Seuil, 1972 ;

  • Rudolf Bultmann, Jésus. Mythologie et démythologisation (1926 et 1958), trad. fr. éd. Seuil, 1968 ;

  • Daniel-Rops, Jésus en son temps, éd. Fayard, 1946 ; La vie quotidienne en Palestine au temps de Jésus, éd. Hachette, 1961 ;

Revues

  • Que sait-on de Jésus ?, revue Le Monde de la Bible, hors-série printemps 2009, éd. Bayard ;

  • Christologie et histoire de Jésus, revue Recherches de science religieuse, tome 97, mars 2009 ;

  • Jésus, revue Le Point, coll. Les grandes biographies, hors série no 1, janvier 2009 ;

  • Jean-Pierre Lémonon, Jésus de Nazareth. Prophète et Sage, éd. Cerf, coll. Cahiers Évangile no 119, 2002 ;

  • Jésus au regard de l’Histoire, revue Les dossiers d’Archéologie no 249, décembre 1999-janvier 2000 ;

Essais

  • Jean-Christian Petitfils, Jésus, Fayard, 2011 ;

  • Christiane Rancé, Jésus, Gallimard, 2008 ;

  • Thimothy Freke et Peter Gandy, Les Mystères de Jésus, éd. Alethéïa, 2007 ;

  • Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, Corpus christi, Enquête sur l’écriture des évangiles, Mille et une nuits, 1998 ; Jésus contre Jésus, Seuil, 2000 ; Jésus illustre et inconnu, Desclée de Brouwer, 2001 ; Jésus après Jésus, Seuil, 2004 ;

  • Marie Vidal, Un juif nommé Jésus, éd. Albin Michel, 2000 ;

  • Manuel de Diéguez, Jésus, éd. Fayard, 1985 ;

Ouvrages anciens

  • Blaise Pascal, Abrégé de la vie de Jésus-Christ, publié par P. Faugère, éd. Andrieux, 1846 (texte inédit retrouvé en 1622), ouvrage en ligne

  • Ernest Renan, Vie de Jésus, éd. Michel Lévy frères, 1863, Ouvrage en ligne ;

  • Albert Schweitzer, Le secret historique de la vie de Jésus, éd. Albin Michel, 1967 (éd. orig. all. 1913) ;

  • Charles Guignebert, Jésus, éd. Albin Michel, 1933, (réédition 1969) ;

  • Claude Tresmontant, L’Enseignement de Ieschoua de Nazareth, éd. Seuil, 1963, ;

  • Jésus, recueil de la collection « Omnibus » (Presses de la Cité, 1999) comprenant le texte intégral de quatre ouvrages :

Ouvrages confessionnels

  • Philip Yancey, Ce Jésus que je ne connaissais pas, éd. Farel, 2000 ;

Histoire de l’art

  • Nissan N. Perez, Revelation – Representations of Christ in Photography, éd. Merrell, 2003 ;

  • François Boespflug, Jean-Michel Spieser, Christian Heck, Valérie Da Costa, Le Christ dans l’art. Des catacombes au XXe siècle, éd. Bayard/Le monde de la Bible, 2000 ;

  • Dominique Ponnau, Figures de Dieu, éd. Textuel, 1999 ;

  • Jean Paris La fuite en Égypte, éd. Le Regard, 1998 ;

  • Jérôme Cottin, Jésus-Christ en écriture d’images; éd. Labor et Fides, 1990, extraits en ligne

 

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